Page:London - Le Talon de fer, trad. Postif.djvu/252

Cette page a été validée par deux contributeurs.

moyens, fût-ce au prix de révoltes locales et révolutions nationales.

La grève générale fut notre grande et unique victoire à nous autres Américains. Le 4 décembre notre ambassadeur fut rappelé de Berlin. Cette nuit-là même, une flotte allemande attaqua Honolulu, coula trois croiseurs américains et un cotre douanier, et bombarda la capitale. Le lendemain, la guerre était déclarée entre l’Allemagne et les États-Unis, et, en moins d’une heure, les socialistes avaient proclamé la grève générale dans les deux pays.

Pour la première fois le Seigneur de Guerre allemand affronta les hommes de sa nation, ceux qui faisaient marcher son empire et sans lesquels lui-même ne pouvait pas le faire marcher. La nouveauté de la situation résidait dans la passivité de leur révolte. Ils ne combattaient pas : ils ne faisaient rien ; et leur inertie liait les mains de leur Kaiser. Il n’eût pas demandé mieux qu’un prétexte pour lâcher ses chiens de guerre sur son prolétariat rebelle ; mais cette occasion lui fut refusée. Il ne put ni mobiliser son armée pour la guerre étrangère, ni déclencher la guerre civile pour punir ses sujets récalcitrants. Aucun rouage ne fonctionnait plus dans son empire : aucun train ne marchait, aucun message ne courait sur les fils, car les télégraphistes et cheminots avaient cessé le travail comme tout le reste de la population.

Et les choses se passèrent aux États-Unis