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simple subsistance. Ils ne pouvaient quitter leurs maîtres, qui appartenaient tous à la ploutocratie, ni aller s’établir dans les villes, où elle était également souveraine. S’ils abandonnaient la terre, ils n’avaient d’autre alternative que de se faire vagabonds, c’est-à-dire de mourir de faim. Et cet expédient même leur fut interdit par des lois draconiennes votées contre le vagabondage et rigoureusement appliquées.

Naturellement, de-ci de-là, il y eut des fermiers, et même des communautés entières, qui échappèrent à l’expropriation par suite de circonstances exceptionnelles. Mais c’étaient, après tout, des isolés qui ne comptaient guère, et qui, dès l’année suivante, furent repris dans la masse de façon ou d’autre[1].

  1. La destruction des comices romains fut bien moins rapide que celle des fermiers et petits capitalistes américains, car le mouvement du XXe siècle procédait d’une force acquise qui n’existait guère dans la Rome antique.

    Un grand nombre de fermiers, poussés par leur attachement déraisonnable à la terre, et désireux de montrer jusqu’où ils pouvaient aller dans le retour à la sauvagerie, essayèrent d’échapper à l’expropriation en se désistant de toutes transactions commerciales. Ils ne vendaient ni n’achetaient plus rien. Entre eux commença à renaître un système primitif d’échanges en nature. Leurs privations et leurs souffrances étaient horribles, mais ils tenaient bon, et le mouvement acquit une certaine ampleur. La tactique de leurs adversaires fut aussi originale que logique et simple. La ploutocratie, forte de sa possession du gouvernement,