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— Oui, c’est tout ce qu’ils donnent, répondit-elle. Six cents pièce pour la finition : et chacune représente deux heures de travail… Mais le patron ne sait pas cela, — ajouta-t-elle vivement, laissant percer sa crainte d’avoir des ennuis. — Je ne vais pas vite. J’ai du rhumatisme dans les mains. Les jeunes femmes sont bien plus habiles que moi. Elles mettent moitié moins de temps à finir la pièce. L’entrepreneur est un brave homme. Il me laisse emporter le travail chez moi, maintenant que je suis vieille et que le bruit de la machine m’étourdit. S’il n’était pas si gentil, je mourrais de faim…

« Oui, celles qui travaillent en atelier ont huit cents. Mais que voulez-vous ? Il n’y a pas assez d’ouvrage pour les jeunes, on n’a pas besoin des vieilles… Souvent je n’ai qu’un pantalon à finir. Quelquefois, comme aujourd’hui, j’en ai huit à livrer avant la nuit. »

Je lui demandai combien d’heures elle travaillait, et elle me dit que cela dépendait de la saison.

— En été, quand les commandes affluent, je travaille depuis cinq heures du matin jusqu’à neuf heures du soir. Mais, en hiver, il fait trop froid. Je n’arrive pas à me dégourdir les mains. Alors il faut travailler plus tard, quelquefois jusqu’après minuit.

« Oui, la saison d’été a été mauvaise. Les temps sont durs. Le bon Dieu doit être fâché. C’est le premier ouvrage que le patron m’ait donné de la