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de grèves[1] armés par les associations de patrons, les Cent-Noirs, surgissant dans les localités les plus éloignées les unes des autres, s’étaient livrés à une intense destruction de propriétés ; en conséquence, cent mille hommes de l’armée régulière des États-Unis furent envoyés pour en finir à la manière forte. Un grand nombre de chefs travaillistes furent exécutés, beaucoup d’autres condamnés à l’emprisonnement, et des milliers de grévistes ordinaires enfermés dans des parcs à bétail[2] et abominablement traités par la soldatesque.

  1. En dessein et en pratique, en tout, excepté le nom, les briseurs de grèves étaient les soldats privés des capitalistes. Parfaitement organisés et armés, ils étaient toujours prêts à être précipités par trains spéciaux sur toute partie du pays où les travailleurs se mettaient en grève ou étaient mis en chômage par leurs employeurs. Une époque si extraordinaire pouvait seule donner le spectacle étonnant d’un certain Farley, chef notoire de briseurs de grèves, qui, en 1906, traversa les États-Unis par trains spéciaux, de New York à San-Francisco, à la tête d’une armée de 2 500 hommes armés et équipés pour briser une grève des charretiers de cette dernière ville. Cet acte était une infraction pure et simple aux lois du pays. Le fait qu’il demeura impuni, comme des milliers d’actes du même genre, montre à quel point l’autorité judiciaire était sous la dépendance de la ploutocratie.
  2. Pendant une grève de mineurs de l’Idaho, dans la seconde moitié du dix-neuvième siècle, il arriva que beaucoup de grévistes furent enfermés par la troupe dans un parc à bestiaux. La chose et le nom se perpétuèrent au vingtième siècle.