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croître de jour en jour ; vous sentez leurs mains gantées de fer s’abattre sur vos profits et en saisir une pincée de-ci, une pincée de-là, le trust des chemins de fer, le trust du pétrole, le trust de l’acier, le trust du charbon ; et vous savez qu’en fin de compte ils vous détruiront, qu’ils vous prendront jusqu’au dernier pourcentage de vos médiocres bénéfices.

« Cela prouve, Monsieur, que vous êtes mauvais joueur. Quand vous avez étranglé les trois épiciers d’ici, vous avez gonflé votre poitrine, vous avez vanté l’efficacité et l’esprit d’entreprise, vous avez envoyé votre épouse en Europe sur les profits que vous aviez réalisés en dévorant ces gagne-petit. C’est la doctrine de chien contre chien, et vous n’avez fait qu’une bouchée de vos rivaux. Mais voici qu’à votre tour vous êtes mordu par des molosses, et vous criez comme des putois. Et ce que je dis de vous est vrai pour tous ceux qui sont à cette table. Vous hurlez tous. Vous êtes en train de jouer une partie perdante, et c’est ce qui vous fait brailler.

« Seulement, en vous lamentant, vous n’êtes pas de franc jeu. Vous n’avouez pas que vous aimez vous-mêmes à tirer des profits des autres en les pressurant, et que si vous faites tout ce tintamarre, c’est parce que d’autres sont en train de vivre sur votre dos. Non, vous êtes trop malins pour cela. Vous dites tout autre chose. Vous faites des discours politiques de petits bourgeois comme tout à l’heure M. Calvin.