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fluence était formidable dans notre ville universitaire, avaient émis l’opinion que pour une jeune personne, je me montrais trop empressée et trop décidée, avec une fâcheuse tendance à me mêler des affaires d’autrui. Je trouvai leur sentiment assez naturel, étant donné le rôle que j’avais joué près d’elles dans mon enquête sur l’affaire Jackson. Mais j’étais loin de comprendre l’importance réelle d’un avis de ce genre, énoncé par des arbitres d’une telle puissance sociale.

Je remarquai bien une certaine réserve dans mon cercle ordinaire de connaissances, mais je l’attribuai à la désapprobation que soulevait mon projet de mariage avec Ernest. C’est plus tard qu’Ernest me démontra comment cette attitude de mon entourage, loin d’être spontanée, était concertée et dirigée par des ressorts occultes.

— Vous avez abrité chez vous un ennemi de votre classe, me dit-il. Non seulement vous lui avez prêté asile, mais vous lui avez donné votre amour et confié votre personne. C’est une trahison envers le clan auquel vous appartenez ; n’espérez pas en esquiver la punition.

Mais, avant cela, un après-midi qu’Ernest était avec moi, Père revint tard à la maison, et nous nous aperçûmes qu’il était en colère, ou du moins dans un accès d’irritation philosophique. Il était rare qu’il sortît de ses gonds, mais il se permettait de temps à autre un certain degré de courroux mesuré. Il appelait cela un tonique.