Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/65

Cette page a été validée par deux contributeurs.
JACK LONDON

faire aussi mal. J’en chavirai et m’effondrai sur le pont. Tout tournait autour de moi. Quant à Loup Larsen, l’opération terminée, il ne me prêta plus aucune attention. Il se contenta de secouer les cendres accrochées à ses vêtements et reprit la conversation interrompue avec Henderson. Johnson, qui avait suivi des yeux toute l’affaire, envoya deux matelots nettoyer le pont.

Un peu plus tard, dans la matinée, j’éprouvai une autre surprise, d’un ordre différent.

Suivant les instructions du coq, j’étais occupé à balayer et à épousseter la cabine de Loup Larsen, et à faire son lit. Contre la cloison, à la tête de la couchette, pendait un filet garni de livres. Curieux de connaître les lectures du capitaine, je les examinai. Quel ne fut pas mon étonnement d’y voir, parmi les noms d’auteurs, ceux de Shakespeare, de Tennyson, d’Edgar Poe et de Quincey.

Il y avait aussi des ouvrages scientifiques, signés de noms connus, traitant notamment d’astronomie et de physique, une Histoire de la Littérature américaine et de la Littérature anglaise, et des grammaires.

Je ne pouvais, dans mon esprit, associer raisonnablement ces volumes à l’homme qu’était Loup Larsen, et je me demandai s’il était vraiment capable de les lire.

Mais, quand j’allai faire le lit, je trouvai, entre les couvertures où il l’avait glissée avant de s’endormir, une édition complète de Robert Browning.

66