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JACK LONDON

de la mer, je réussis assez rapidement à éteindre le feu. Dix minutes après, l’atmosphère étant redevenue respirable, j’autorisai Maud à descendre dans la cabine. Je dégageai Loup Larsen de sa couverture et de ses draps. Il avait perdu connaissance.

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La paralysie de Loup Larsen gagne toujours. Elle est presque générale.

Un matin, quand nous l’avons trouvé, il ne pouvait plus parler. Il a fait signe qu’il désirait un crayon et du papier. De sa main gauche, qui ne cesse de trembler, il a écrit :

« Je vis encore. Le morceau de ferment n’est pas mort. »

— Oui, mais il s’amenuise de plus en plus, lui dis-je.

Il rajouta sur la feuille :

« Songez qu’il va encore s’amenuiser jusqu’à ma mort. Je n’ai jamais été plus lucide de ma vie. Je suis toujours là. »

C’était comme un message qui venait des ténèbres de la tombe. Le corps de cet homme, si formidable hier, n’était plus qu’un sépulcre où son âme se débattait.

Le lendemain il écrivit :

« L’engourdissement s’accentue. Je peux à peine bouger ma main. Il faut me parler plus haut. Les dernières lignes de communication se rompent. »

Je lui demandai s’il souffrait beaucoup. Je dus, à deux reprises, réitérer ma question. Il répondit :

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