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Jack London

cadavre du second, où il se tortilla de douleur.

— Alors… nargua Loup Larsen. Es-tu décidé à obéir ?

Mais, durant ce temps, je n’avais pas cessé d’observer la goélette, qui n’était plus maintenant qu’à deux cents mètres de nous, environ.

C’était un petit navire, coquet et bien tenu. Je pouvais discerner, sur une de ses voiles, un grand numéro peint en noir.

— Quel est ce bateau ? demandai-je.

— C’est le bateau-pilote Lady-Mine, grommela Loup Larsen. Il regagne San Francisco. Si ce vent tient, il y sera dans cinq ou six heures.

— Je vous prie de lui faire les signaux d’usage, pour qu’il vienne me prendre et me reconduire à terre.

— Désolé ! Mais j’ai perdu mon livre de signaux. Je l’ai laissé tomber à la mer.

Cette plaisanterie fit ricaner le groupe des chasseurs de phoques.

Je réfléchis un instant, tout en regardant Loup Larsen, en plein dans les yeux. J’avais assisté au traitement terrible subi par le mousse, et je n’ignorais pas que je risquais d’en recevoir un tout pareil, sinon pire.

Malgré cette appréhension, je me décidai à accomplir l’acte considéré par moi comme le plus courageux de ma vie. Je courus jusqu’à la lisse, et j’y agitai les bras, en hurlant de toutes mes forces :

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