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JACK LONDON

Ce n’était pas elle, pendant ce temps, que j’observais, mais Loup Larsen. Il était complètement hors de lui et enveloppait Maud d’un regard fasciné.

D’un mouvement inconscient, il remuait les lèvres, à mesure que la jeune femme récitait son poème.

Il l’interrompit, quand elle en arriva à ces vers :

Quand se couchera le soleil
Ses beaux yeux me seront la clarté qui console.
Sa voix bercera mon sommeil,
Sa voix où chante une viole.

— Il y a aussi des sons de viole dans votre voix, dit-il brusquement.

Et ses prunelles bleues se mirent à étinceler de leur éclat d’or.

Je haletai, et la jalousie me mordit le cœur. Mais apparemment Maud n’avait pas entendu le compliment. Elle débita, impassible, la dernière strophe et détourna la conversation vers des sujets moins dangereux.

Le dîner était terminé et personne n’était venu desservir la table. Le remplaçant de Mugridge s’en était évidemment allé rejoindre ses camarades au poste d’avant et boire avec eux.

Je m’assis dans un coin, en une demi-torpeur, écoutant le tumulte du poste d’arrière, qui

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