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JACK LONDON

— M. Van Weyden a parlé ! déclara Loup Larsen. Il faut nous en tenir à son opinion. Oh ! ce n’est pas que ce soit un homme d’une valeur considérable… Mais il parle ici par expérience. Son séjour sur le Fantôme lui a été très profitable. J’aurais voulu que vous le voyiez quand il est arrivé à bord. Il était difficile d’imaginer un spécimen d’homme plus pitoyable. N’est-ce pas, Kerfoot ?

Kerfoot, en s’entendant directement interpeller, en fut si troublé qu’il en laissa tomber son couteau sur le plancher, tout en émettant un grognement affirmatif.

— Mais il est en net progrès, je le reconnais, continua Loup Larsen. C’est en pelant des pommes de terre et en lavant la vaisselle qu’il est devenu quelqu’un. Hein, Kerfoot ?

Un nouveau grognement approuva.

— Regardez-le maintenant ! Ce n’est évidemment pas un athlète. Mais il a des muscles, ce qu’il ne possédait pas quand on l’a repêché. Il a aussi des jambes, sur lesquelles il sait se tenir. Vous ne croiriez jamais, à le voir, qu’il était incapable de se porter lui-même.

Les chasseurs de phoques riaient sous cape et j’étais furieux contre Loup Larsen, qui insultait, devant une femme, à ma dignité d’homme et raillait les jambes qu’il prétendait m’avoir données.

Mais l’inconnue, au lieu de rire de moi, m’observait avec une évidente sympathie. Elle comprenait,

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