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Le Loup des mers

à peine au coude, complétèrent mon accoutrement.

— Et qui dois-je remercier de toutes ces bontés ? demandai-je.

Mon interlocuteur se dressa sur ses ergots, avec ce mélange d’insolence servile et d’humilité feinte qui, sur les transatlantiques, est propre aux stewards, lorsque la traversée tire à sa fin et qu’ils attendent le pourboire d’usage.

— Mugridge… me répondit le coq, d’un ton patelin, un sourire heureux éclairant ses traits efféminés. Thomas Mugridge, pour vous servir.

— Très bien, Mugridge… Je n’oublierai pas de vous témoigner ma reconnaissance… Quand mes vêtements seront secs.

Son visage rayonna, comme si, dans les profondeurs de son être, tous ses ancêtres avaient tressailli, au souvenir des pourboires passés empochés par eux.

— Merci, Monsieur. Merci mille fois, fit-il en manifestant beaucoup de confusion et de modestie.

Je tirai la porte, qui s’ouvrait en arrière, et il s’effaça obséquieusement pour me laisser passer.

Je m’avançai sur le pont. Par suite de mon immersion prolongée, j’étais encore très faible. La goélette donnait fortement de la bande et piquait du nez dans la grande houle du Pacifique. Une rafale me fit perdre l’équilibre sur ce plancher mouvant, et je m’en allai rouler jusqu’à un capot, auquel, après m’être relevé, je m’arc-boutai de mon mieux.

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