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Jack London

des faubourgs de Londres qui avait, en même temps qu’il buvait le lait de sa mère, largement absorbé le son des cloches de Sainte-Marie-le-Bow[1].

Maigre et efflanqué, avec des manières efféminées, il était coiffé d’une casquette blanche dégoûtante, et ceint d’un tablier de grosse toile, non moins repoussant. Accoutrement qui le désignait clairement comme le maître-coq de la plus infecte cuisine qu’il y ait jamais eue sur un bateau.

— Alors, comment vous sentez-vous ? me demanda-t-il, avec ce sourire obséquieux qui lui provenait de plusieurs générations d’ancêtres en quête de pourboires.

J’étais encore extrêmement faible et, pour toute réponse, je me mis péniblement sur mon séant. Puis, avec l’aide de Yonson, je parvins à me lever tout à fait.

Le tintamarre que faisait la poêle à frire, et qui n’arrêtait pas, me tapait sur les nerfs. Je n’arrivais pas à rassembler mes esprits. Après m’être cramponné à la boiserie, avec un mouvement de dégoût au contact de la couche de graisse dont elle était imprégnée, j’allai, en titubant, vers le fourneau qui était tout rouge. Une fois là, j’atteignis de la main l’ustensile, le décrochai et le fourrai, bien en sûreté, dans le coffre à charbon.

Le coq esquissa une grimace devant cette marque de nervosité que je venais de donner,

  1. Église de Londres, dans le quartier de Cheapside.