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aucun moyen de participer à cette vie farouche d’aventures que je désirais ardemment mener. Tous les hommes du métier passaient par là. Si je voulais vivre cette même vie, je devais la vivre à leur manière.

C’est grâce à la boisson que je devins le camarade de Nelson, et son associé. Si j’avais bu seulement la bière payée par lui, ou refusé son invitation, il ne m’aurait jamais choisi. Il lui fallait un compagnon qui fût son égal, aussi bien au point de vue social qu’au point de vue du travail.

Je me laissai aller à cette vie et me pénétrai de cette fausse conception que je découvrirais le secret de John Barleycorn en m’adonnant aux pires beuveries, et, par degrés que pouvait seule apporter une constitution de fer, jusqu’au complet abrutissement et à l’inconscience du pourceau.

Je détestais le goût de l’alcool, aussi je le buvais dans le seul but de m’enivrer, à ne plus tenir debout et à rouler sous la table. Moi qui, jusqu’alors, économisais en avare, trafiquais comme un vrai Shylock et faisais pleurer de rage les fripiers, moi qui étais resté ahuri le jour où Frank-le-Français dépensa d’un seul coup quatre-vingt cents de whisky pour huit camarades, je me détachais aujourd’hui de l’argent avec plus de dédain que le plus prodigue d’entre eux !

Je me souviens d’une nuit passée à terre avec Nelson. J’avais en poche cent quatre-vingts dollars. Mon intention était d’abord de m’acheter des vêtements, puis d’aller au bar. Il me fallait absolument des habits, je portais sur moi toute