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temps nous reformions le cercle autour d’eux ; lorsqu’on les voyait épuisés sur le sable, incapables de frapper un autre coup, on leur donnait des avis de ce genre : « Lance-lui du sable dans les yeux ! » Ils suivaient notre conseil, puis une iois qu’ils avaient récupéré, ils s’empoignaient de nouveau. La bataille dura jusqu’à l’épuisement des adversaires.

Après toute cette description de scènes sordides, ridicules et bestiales, essayez de vous imaginer ce qu’elles signifiaient pour un enfant de seize ans à peine consumé par le désir des aventures, la tête farcie d’histoires de boucaniers, de pilleurs d’épaves, de villes mises à sac, de rencontres à main armée, et surexcité par la drogue absorbée. J’avais devant moi la vie brutale et nue, sauvage et libre, la seule à laquelle ma naissance me permettait d’atteindre.

Bien plus : cette scène renfermait une promesse. Ce n’était qu’un début. Du banc de sable, la route menait, par la Porte d’Or, à l’immense aventure du monde, où se livraient des batailles non plus pour de vieilles chemises ou des canots de pêche volés, mais pour des desseins élevés et romanesques.

Enfin, comme je reprochais à Scotty de s’être laissé régler son compte par un vieux type comme Frank-le-Français, nous nous disputâmes, ce qui réjouit tout le monde. Scotty abandonna ses fonctions d’équipage et disparut dans l’obscurité avec une paire de mes couvertures.

Or, pendant la nuit, tandis que les pilleurs d’huîtres étaient vautrés, abrutis, sur leurs couchettes, la goélette et le Reindeer flottèrent tout