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l’on pût concevoir et admirer même parmi les gens du port d’Oakland.

Tandis que je payais les tournées — les autres n’étaient pas en reste — une pensée vacillait dans mon esprit : Mammy Jennie allait recevoir un maigre acompte sur l’argent qu’avait gagné, cette semaine-là, le Razzie-Dazzle. Mais qu’importé ? pensai-je ensuite, ou plutôt John Barleycorn s’en chargea pour moi. Tu es un homme et tu fais la connaissance d’autres hommes. Mammy Jennie n’est pas si pressée de toucher cet argent. Elle ne meurt pas de faim, tu le sais bien. Elle a un compte en banque. Laisse-la attendre, tu la rembourseras petit à petit.

Voilà comment un nouveau trait de John Barleycorn me fut révélé. Il proscrit toute moralité : une mauvaise action, impossible à jeun, devient la chose la plus facile du monde dès qu’on a un verre dans le nez ; elle paraît, en réalité, la seule chose faisable, car l’interdiction de John Barleycorn se dresse comme un mur entre nos désirs immédiats et la moralité depuis longtemps apprise.

Je refoulai le souvenir de ma dette envers Mammy Jennie et continuai à me faire des relations en me délestant de ces sommes insignifiantes.

J’ignore qui me ramena à bord et me coucha cette nuit-là, mais j’ai tout lieu de supposer que ce fut l’Araignée.