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— Oh ! avec Nelson, répondis-je négligemment, pour dissimuler mon orgueil.

Alors il me vint une idée. J’avais encore affaire à un de ces lascars. Puisque j’avais formulé mon concept, pourquoi ne pas l’appliquer jusqu’au bout ?

— Viens prendre un verre chez Johnny, lui dis-je.

En remontant le quai, nous croisâmes le Peigne. C’était l’associé de Nelson, un superbe gars de trente ans, brave et moustachu, tout l’opposé, en somme, d’un « mollusque ». Je l’interpellai :

— Viens-tu avec nous ? c’est ma tournée.

Comme nous entrions au bar de la « Dernière Chance », je vis Pat, le frère de la Reine, qui en sortait.

— Tu es pressé ? lui dis-je en manière de salutation. On va boire un coup. Sois des nôtres.

— Je viens d’en prendre, répondit-il en hésitant.

— Et après ? J’en offre un autre, répliquai-je.

Pat consentit à se joindre à nous. Grâce à quelques verres de bière, je réussis à gagner ses bonnes grâces. Oh ! j’apprenais à connaître John Barleycorn cet après-midi-là. Il compensait par d’autres avantages le mauvais goût qu’il vous laissait aux lèvres. Pour l’absurde somme de dix cents, il vous transformait en ami dévoué un individu mélancolique et grincheux qui menaçait de se changer en ennemi. Pat devint même enjoué, son expression se fit aimable et nos deux voix s’adoucirent pour parler du port et des bancs d’huîtres.

— Un petit pour moi, Johnny, dis-je, lorsque les autres eurent commandé leurs gobelets. Je prononçai ces paroles en buveur consommé,