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que je gardais comme garantie de vingts cents prêtés à un petit commissionnaire qui fut envoyé en maison de correction avant d’avoir pu racheter sa dette).

Je faisais commerce de tout ce qui est imaginable, j’échangeais mes articles une douzaine de fois, jusqu’à ce qu’ils eussent atteint une réelle valeur. J’étais renommé comme trafiquant, et célèbre pour ma ladrerie. J’en arrivais à faire verser des larmes à un fripier, quand nous avions affaire ensemble. Les autres gamins m’appelaient chez eux pour me confier la vente de leurs collections de bouteilles, de chiffons, de ferraille,, de graines, de sacs de jute, de bidons à pétrole de cinq litres — oui, et ils me réservaient une commission pour ma peine.

Tel était le gosse, économe jusqu’à l’avarice, accoutumé à travailler comme un esclave à la machine pour dix cents par heure, qui restait assis sur le parapet et approfondissait cette question de bière à cinq cents le verre, disparu en un clin d’œil, sans la moindre compensation tangible.

Je me trouvais maintenant au milieu d’hommes que j’admirais et j’étais fier de leur compagnie. Ma lésinerie et mon épargne m’avaient-elles jamais procuré l’équivalent d’une des émotions ressenties depuis le jour où je faisais partie de la bande des pilleurs d’huîtres ? Alors, qu’est-ce qui valait le mieux, de l’argent ou des émotions ? Que représentaient pour ces aventuriers une ou plusieurs pièces de monnaie ? Ils avaient un mépris si superbe de l’argent qu’ils n’hésitaient pas à inviter huit camarades pour boire du whisky à dix cents le verre, témoin Frank-le-