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mon youyou du yacht pour ne pas endommager la peinture blanche, en le laissant filer à l’arrière au bout de son amarre que je nouai nonchalamment par une double-clef.

Nous descendîmes. Pour la première fois je voyais l’intérieur d’un bateau. Les vêtements, sur les murs, sentaient le moisi. Mais qu’importait ? C’était l’attirail de matelots : vestes en cuir doublées de velours à côtes, paletots de drap bleu marine, bottes de caoutchouc, suroîts et surtouts de toile cirée.

L’économie de place se manifestait dans les couchettes étroites, les tables abattantes, les tiroirs ménagés dans les endroits les plus invraisemblables. Je remarquai l’axiomètre du gouvernail, les lampes marines dans leurs cadrans, les cartes au revers bleu roulées négligemment et rangées dans un coin, les signaux en ordre alphabétique et un compas de marinier piqué dans la cloison pour tenir un calendrier.

Enfin, je vivais. Je me trouvais là sur mon premier bateau, un bateau de contrebandier, et traité en camarade par un harponneur et un marin déserteur anglais qui disait s’appeler Scotty.

Le première chose que firent le harponneur de dix-neuf ans et le marin de dix-sept, pour prouver qu’ils étaient des hommes, fut de se conduire comme tels. Le harponneur suggéra que la meilleure chose à faire, c’était de boire quelque chose, et Scotty chercha dans ses poches des pièces de monnaie. Puis l’autre s’éloigna avec un flacon rosé pour le faire emplir dans un débit clandestin car il n’y avait pas de bistrot autorisé aux environs. Nous absorbâmes l’immonde