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doute elle me croyait inapte à les apprécier — je pleurai à chaudes larmes pendant les cinq kilomètres qui séparaient l’école du ranch. J’attendais avec impatience un bon mouvement de sa part. Plus de vingt fois, je fus sur le point de le provoquer, mais il me manqua toujours le toupet nécessaire.

Alors apparut dans ma vie la ville d’Oakland, et sur les rayons de sa bibliothèque municipale, je vis un monde immense surgir à l’horizon. Il y avait là des milliers de livres aussi bons que mes quatre merveilles, et même quelques-uns de meilleurs.

À cette époque, on n’écrivait pas d’ouvrages pour les enfants, et il m’arriva d’étranges aventures. Je me rappelle avoir été impressionné, en consultant le catalogue, par ce titre : Les Aventures du Pèlerin Pickle. Je remplis un bulletin et le bibliothécaire me remit la collection des œuvres complètes et non expurgées des œuvres de Smoilett, en un énorme volume. Je lisais tout, mais je m’attachais surtout à l’histoire, aux aventures et aux anciens voyages sur terre et sur mer. Je lisais le matin, l’après-midi et la nuit. Je lisais au lit, à table, à l’aller et au retour de l’école, je lisais aux récréations, pendant que mes camarades s’amusaient. Je commençais à avoir des tics. Je répondais à tout le monde : « Allez-vous-en ! Vous m’agacez ! »

Et puis, à dix ans, me voilà dans les rues à crier les journaux. Je n’avais plus le temps de lire. J’avais trop à faire : courir, apprendre à me battre, à devenir entreprenant, insolent et vantard. Mon imagination et mon envie de tout