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hommes traitaient leurs affaires, John Barîeycorn apparut et me prit par le bras. Le capitaine avait confié notre argent aux chasseurs, qui nous attendaient pour nous le remettre dans un certain café japonais, où nous nous rendîmes en pousse-pousse. Nos camarades l’emplissaient déjà. Les boissons coulaient à flots. Tout le monde avait de l’argent et régalait son voisin.

Après cette rude besogne et cette abstinence totale de cent jours, nous nous trouvions dans la meilleure forme possible, débordants de santé et d’une fougue trop longtemps réprimée par la discipline et les circonstances. Naturellement, nous n’étions entrés que pour boire un coup ou deux ; nous devions ensuite visiter la ville.

Toujours l’éternelle histoire. Il fallut si souvent lever le coude que sous la chaude influence du philtre qui coulait dans nos veines, adoucissait nos voix et nous fondait le cœur, nous trouvâmes le moment mal choisi pour établir d’odieuses distinctions en trinquant avec celui-ci ou refusant l’invitation de celui-là. Après tout, nous étions tous compagnons de bord, nous avions affronté ensemble l’effort et la tempête, tiré et haie les mêmes écoutes et les mêmes cordages ; nous nous étions relayés à tour de rôle au gouvernail, pressés côte à côte sur le même bout-dehors ; nous avions cherché si quelqu’un manquait, lorsque le bâtiment se relevait après avoir plongé dans la mer.

Nous buvions donc avec tout le monde — tous y allaient de leurs tournées — nous élevions la voix, au souvenir des milliers d’actes de bonne camaraderie. Nos rixes et nos querelles étaient