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beaucoup plus aisé de se mettre à fumer qu’à boire. Et tout cela parce que l’alcool est si facile à acheter. Les femmes, elles, savent bien de quoi il retourne, elles sont payées pour cela, épouses, sœurs et mères. Et, le jour où elles voteront, ce sera en faveur de la prohibition. Le mieux est que la génération à venir n’en souffrira nullement ; n’ayant pas accès à l’alcool, et n’y étant pas prédisposée, elle n’en ressentira pas la privation. Il en résultera une virilité plus généreuse pour les jeunes gens et ceux oui sont en train de grandir, et une vitalité plus abondante aussi pour les jeunes filles appelées à partager leur vie.

— Pourquoi ne pas écrire tout cela pour la jeunesse qui vient ? demanda Charmian. Pourquoi ne pas indiquer ainsi aux épouses, sœurs et mères, la façon dont elles devront voter ?

— Les « Mémoires d’un alcoolique » ! ricanai-je, ou plutôt ce fut John Barleycorn qui montra les dents, car il était assis avec moi à table et écoutait ma plaisante dissertation philosophique, et c’est un de ses tours favoris que de transformer brusquement son sourire en grimace.

— Non, dit Charmian, ignorant à dessein la grossièreté de John Barleycorn, comme tant de femmes ont appris à le faire. Tu ne t’es jamais révélé alcoolique ni dipsomane ; tu as simplement pris l’habitude de boire ; tu as fini par faire connaissance avec John Barleycorn à force de le coudoyer. Écris tout cela et intitule-le : « Mémoires alcooliques ».

CHAPITRE II

Ses divers aspects


Avant même de commencer, je voudrais m’attacher le lecteur en toute sympathie, et, puisque ce sentiment n’est que de la compréhension, je désire qu’on me connaisse assez bien, dès le début, pour com-