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peuvent s’étonner devant le tableau des victimes.

Les survivants des grandes tueries d’autrefois criaient qu’il ne fallait plus de guerres. Moi je crie que nos jeunes gens ne doivent plus avoir à se battre contre le poison. Pour qu’il n’y ait plus de guerres, il faut empêcher les batailles. Pour supprimer l’ivrognerie, il faut empêcher de boire. La Chine a mis fin à l’usage général de l’opium en en interdisant la culture et l’importation. Les philosophes, les prêtres et les docteurs de la Chine auraient pu prêcher jusqu’à extinction de voix, prêcher pendant mille ans, et l’usage de la drogue aurait continué sans ralentisse ment tant qu’il était possible de s’en procurer. Les hommes sont ainsi faits, voilà tout.

Nous nous sommes appliqués, et nous avons parfaitement réussi, à ne pas laisser trainer de l’arsenic et de la strychnine ou des germes de typhoïde et de tuberculose à portée de nos enfants. Traitez John Barleycorn de la même façon. Arrêtez-le. Ne le laissez pas s’embusquer sous la protection légale des licences, pour sauter à la gorge de notre jeunesse. Ce n’est pas pour les alcooliques que je plaide, c’est pour nos jeunes gens, pour ceux qui sont stimulés par un esprit aventureux et un caractère sympathique, prédisposés à une sociabilité virile : ce sont ceux-là que notre civilisation barbare déforme en les alimentant de poison à tous les coins de rue : et c’est pour eux que j’écris, pour ces garçons sains et normaux, nés ou à naître.

C’est pour cette raison, plus que pour toute autre, et plus sincèrement que pour toute autre, que je ; suis descendu à cheval dans la Vallée de la Lune, fortement émé-