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UN DRAME AU KLONDIKE

portefeuille enfermait des lettres dans leurs enveloppes, timbrées de l’étranger, divers reçus et des feuilles de papier portant des comptes divers ; puis encore une lettre de crédit, de huit cents dollars. Et c’était tout. Pas un sou d’argent liquide.

Morganson, désappointé, décida de s’en revenir vers le traîneau. Mais un de ses pieds s’était comme enraciné dans le sol. Il abaissa son regard et vit, autour de son mocassin, une flaque de sang congelé. La neige qui était attachée à la jambe de son pantalon était rouge aussi.

D’un violent effort, il se dégagea de l’emprise glacée de son propre sang et rallia le traîneau. Le molosse qui l’avait mordu recommença à grogner et à bondir vers lui dans ses traits. Les autres chiens firent de même.

Durant un bref instant, Morganson pleura. De droite et de gauche il balança son corps indécis. Puis il essuya les larmes, déjà gelées, qui lui pendaient aux cils. Il songea que le sort railleur lui avait joué une fameuse farce. Visiblement, avec sa barbe noire qui pointait vers le ciel, John Thomson se moquait de lui.

Comme un fou, il rôda autour du traîneau, tantôt pleurant et suppliant les brutes féroces de lui laisser prendre sa vie, et tantôt écumant contre elles d’une rage impuissante. Puis il se calma. Il n’était qu’un sot. Il lui suffirait de retourner à sa tente, d’y prendre sa hache, puis de revenir vers les chiens, pour leur fendre le crâne. Ah ! Ah !