flée et tâchant de rassembler ses pensées. Puis, s’étant rafraîchi l’estomac avec une gorgée d’eau, qu’il lampa à même le fleuve, il se sentit mieux. Alors, il se redressa et, seul sur le Yukon désert qui s’étendait à perte de vue autour de lui, parmi l’immense silence désolé, troublé seulement par quelques rumeurs sauvages, il maudit longuement, et à voix haute, le whisky et les boissons fortes. Après quoi, il amarra sa barque à un énorme sapin flottant, sur lequel le courant avait plus de prise, et qui l’entraîna plus rapidement à sa suite. Il termina en se lavant la figure et les mains dans l’eau du Yukon, s’assit à l’arrière du bateau et se replongea dans ses pensées.
Le mois de juin finissait. Il n’y avait, en cette saison, point d’obscurité nocturne sur la terre arctique et, vingt-quatre heures durant, O’Brien pouvait naviguer, à la vitesse de cinq milles à l’heure. Seul, le temps nécessaire au sommeil devait interrompre cette course folle, qui se faisait sans dépense d’énergie de la part de l’homme. Il calcula qu’en moins de vingt jours il aurait atteint la mer.