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l’homme au-delà de ce qu’il était nécessaire.

Ce n’était point qu’il fût autrement blasé de ce spectacle. Il était un nouveau venu, un Chechaquo[1], et c’était son premier hiver sur la Terre du Nord. Mais nulle imagination superflue ne venait jeter la peur dans son cerveau. D’esprit énergique et net devant les réalités, il ne s’attardait point à philosopher sur elles.

En face de la formidable nature qui l’étreignait, il ne méditait point sur la fragilité de l’être humain, sur la place qui lui a été assignée dans l’univers, sur les limites extrêmes du chaud et du froid, qui lui permettent d’y vivre ou l’y condamnent à mourir, et, s’il succombe, sur l’immortalité de son âme. Cinquante degrés sous zéro ne l’impressionnaient pas plus, en eux-mêmes, que quatre-vingts

  1. Dans White-Fang, ou Croc-Blanc (Ch. XVI, Le Dieu Fou), Jack London nous apprend que : « … les quelques hommes blancs qui se trouvaient à Fort-Yukon se dénommaient eux-mêmes, avec orgueil, les Sour-Doughs, ou les Pâtes-Aigres, parce qu’ils préparaient, sans levure, un pain légèrement acidulé. Ils ne professaient que du dédain pour les autres hommes blancs qu’amenaient les vapeurs et qu’ils désignaient sous le nom de Chechacos, parce que ceux-ci faisaient, au contraire, lever leur pain pour le cuire. » (Note des Traducteurs.)