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vertes. Les trois autres, situés plus loin, s’appelaient respectivement le Caprice, la Reine des Huîtres et le Hollandais-Volant.

Chacun de ces bateaux avait une cabine de milieu dont le toit laissait dépasser le tuyau d’un poële. Une fumée sortait de celui du Fantôme.

Les portes de la cabine étaient ouvertes et le toit à glissière en partie rentré, de sorte que Joë pouvait voir l’intérieur et observer l’occupant, un jeune homme de dix-neuf à vingt ans s’affairant à cuisiner. Il portait de longues bottes marines qui lui montaient aux hanches, une combinaison de toile bleue et une chemise de laine foncée. Les manches, relevées jusqu’aux coudes, découvraient des bras solides et bronzés, et la tête que le jeune homme releva un instant était également tannée.

L’arôme du café parvint aux narines de Joë en même temps qu’une odeur de haricots presque cuits qui s’échappait d’une petite marmite. Le cuisinier posa une poêle à frire sur le fourneau, et, quand elle fut chaude il la graissa, puis y jeta une large tranche de bifteck. Ce faisant, il causait avec un camarade resté sur le pont, fort occupé à puiser de l’eau de mer pour rafraîchir des monceaux d’huîtres qu’il recouvrit de sacs mouillés, avant d’entrer dans la cabine où une place lui était réservée à la petite table auprès du cuisinier, son convive.

L’esprit romanesque de Joë s’éveilla à cette vue. Voilà une vie qui valait la peine d’être vécue ! Ces gens-là vivaient : ils gagnaient leur pain en plein air, sous le ciel, avec la mer pour les bercer, le vent pour les rafraîchir ou la pluie pour les doucher au petit