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— De ta… ta… sœur… Bessie. »

Le mot sembla s’échapper à grand-peine de ses lèvres, avec un respect timide, comme s’il s’agissait d’un être sacré. Joë en demeura un instant interdit. Il ne discernait aucun rapport entre les deux jeunes filles. Et, à ses yeux, toutes les femmes étaient de sottes créatures qui ne valaient pas la peine qu’on s’en occupât.

« Le voilà qui se met à rougir », pensa-t-il, considérant le léger afflux de sang qui montait aux joues de Frisco Kid.

Il fut pris d’une irrésistible envie de s’esclaffer et s’efforça de la contenir.

« Non ! non ! Je t’en prie ! », s’écria Frisco Kid. Il arracha le papier des mains de Joë et, de ses doigts tremblants, le remit en place dans la boîte à ouvrage. Puis il ajouta, d’une voix plus lente :

« J’avais cru… comme ça, que… que… tu me comprendrais et… je… je… »

Ses lèvres frémissaient et malgré lui des larmes brillaient dans ses yeux. Vivement, il s’écarta de son ami.

L’instant d’après, Joë se rapprocha et lui entoura les épaules de son bras. Poussé par quelque instinct mystérieux, il avait fait le geste sans y penser. La semaine précédente, jamais il n’aurait pu s’imaginer dans une telle situation : le bras passé autour des épaules d’un camarade. À présent, elle lui paraissait toute naturelle. Sans chercher à l’analyser, il pressentait que ce moment était pour Frisco Kid d’une importance capitale.