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L’APPEL DE LA FORÊT

Il demeurait sur les flancs du troupeau, harcelant les femelles et les petits, enveloppant la troupe d’un cercle hostile, rendant l’animal blessé fou de rage impuissante. Cela dura toute la journée. Au coucher du soleil, les jeunes se montraient déjà moins ardents à venir au secours de leur chef obsédé. L’approche de l’hiver, obscurément pressenti, les entraînait vers des pâturages mieux abrités, et leur instinct les poussait à sacrifier une tête unique pour le salut du troupeau entier.

Quand la nuit tomba, le vieux mâle se tenait la tête basse, regardant s’éloigner les compagnons qu’il ne pouvait plus suivre ; les vaches qu’il avait protégées, les veaux dont il était le père, les jeunes audacieux qu’il avait vaincus, tous disparaissaient, d’une allure se faisant toujours plus rapide, dans la lumière expirante du soir.

Il allait terminer sa longue carrière de luttes et de victoires sous la dent