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Cependant, le patron ne réussit point à saisir mes explications, pas plus, d’ailleurs, que son employé. La rue vint à notre aide… C’est-à-dire, en l’espèce, autant de piétons que pouvait en contenir l’échoppe ; les autres, incapables de se faufiler à l’intérieur, demeurèrent sur le trottoir.

Le marchand de chaussures et le reste des passants m’interpellèrent l’un après l’autre avec une volubilité intarissable ; d’après l’expression des visages, je compris que tous ces braves gens me prenaient pour un sinistre idiot.

De nouveau, je recourus à mon stratagème. Je leur montrai, sur mon croquis, notre boutique, puis les autres : revenant à celle-ci, j’indiquai du doigt la peau de léopard et, de la pointe de mon crayon, je refis le tour de tous les magasins imaginaires.

Tout le monde me regardait sans mot dire, lorsque, enfin, je discernai une lueur d’intelligence sur le visage d’un gamin.

— Tigre de Montañas ! s’écria-t-il.

Il voulait dire évidemment : tigre de montagne, ou léopard. Pour me signifier qu’il avait bien compris, le gosse me fit signe de le suivre. Je m’exécutai. Après une marche de cinq cents mètres, il s’arrêta à la porte d’un vaste édifice devant laquelle des sentinelles faisaient les cent pas, et par où entraient et sortaient d’autres soldats. Il me pria de l’attendre et franchit la porte en courant.

Un quart d’heure après, il revenait, sans la moin-