Page:London - En pays lointain.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
37
YAN, L'IRRÉDUCTIBLE

civilisation pour se vautrer dans la rudesse primitive, voit un jour se dresser, dans son imagination, les vallées fertiles de son pays natal et sent pénétrer dans ses narines le parfum du foin coupé, de la verdure, des fleurs et de la terre fraîchement labourée.

Pendant cinq années glaciales, sa démence avait eu le temps de germer au cours de son pénible labeur le long du fleuve Stewart, à Forty Mile, Circle City, Koyukuk, Kotzebue. Elle avait atteint son point culminant à Nome, non la ville aux grèves d’or et aux sables rouges, mais la Nome de 97, avant le lotissement de la Cité de l’Enclume, ou l’organisation du district de l’Eldorado.

John Gordon, Yankee de naissance, aurait dû faire preuve de plus de discernement. Pourquoi avait-il lâché le mot blessant juste à un moment ou Yan, torturé par la nostalgie, grinçait des dents, et où ses yeux, injectés, lançaient des flammes ?

Il en était plus avancé ! La tente sentait à présent la poudre ; un homme gisait immobile, et un autre se débattait comme un rat acculé, en refusant de se livrer à ses camarades, pour être pendu de la façon discrète préconisée par eux.

— Si vous vouliez bien me le permettre, Monsieur Lawson, avant de continuer ce vacarme, je vous indiquerais un excellent moyen pour forcer cette vermine à desserrer les dents. Il ne veut ni me trancher le doigt, ni me le lâcher. Il a l’astuce du serpent, Monsieur, l’astuce du serpent !

— La hachette ! vociféra le matelot, la hachette !