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L’ABNÉGATION DES FEMMES

Je reçus de l’argent du gouvernement, des cartes d’un pays inconnu des hommes et des dépêches. Celles-ci étaient scellées, protégées soigneusement contre les intempéries, et j’avais ordre de les délivrer aux baleiniers de l’Arctique, pris dans les glaces à l’embouchure du grand Mackenzie. Jamais on ne vit plus grande rivière, excepté notre Yukon, la mère de toutes les rivières.

Mais tout ceci importe peu, car mon récit ne traite ni des baleiniers, ni de mon hivernage près du Mackenzie.

Plus tard, au printemps, lorsque les jours devinrent plus longs et la neige praticable, nous regagnâmes le Sud, Passuk et moi, vers la contrée du Yukon.

Ce fut un pénible voyage, mais le soleil guidait nos pas.

C’était alors une contrée déserte, et nous remontâmes le courant à la perche et à la pagaie jusqu’à Forty-Mile.

Il faisait bon revoir des visages blancs et nous nous arrêtâmes sur la rive.

Dans cet hiver cruel, l’obscurité et le froid tombèrent sur nous et, avec eux, la famine. L’agent de la Compagnie allouait à chaque homme quarante livres de farine et vingt de lard. Les haricots manquaient.

Les chiens hurlaient sans cesse ; il y avait des ventres creux et des visages émaciés. Les hommes forts devenaient faibles, et les faibles succombaient. Les cas de scorbut étaient fréquents.