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mît de communiquer au louveteau ce qu’elle connaissait.

Comme elle chassait, de son côté, vers la branche droite du torrent, dans les parages où gîtait le lynx, elle avait rencontré une piste tracée par le vieux loup et vieille d’un jour. L’ayant suivie, elle avait trouvé, à son extrémité, d’autres empreintes, imprimées par le lynx, et les vestiges d’une bataille dans laquelle le félin avait eu la victoire. C’était de son compagnon, avec quelques os, tout ce qui subsistait. Les traces du lynx, qui continuaient au delà, lui avaient fait découvrir la tanière de l’ennemi. Mais, ayant reconnu, à divers indices, que celui-ci y était revenu, elle n’avait pas osé s’y aventurer.

Et toujours, depuis, la louve évitait la branche droite du torrent, car elle savait que dans la tanière se trouvait une portée de petits et elle connaissait le lynx pour une féroce créature, d’un caractère intraitable, et un terrible combattant. Oui, certes, c’était bien, pour une demi-douzaine de loups, de pourchasser un lynx et de le repousser au faîte d’un arbre, crachant et se hérissant. Un combat singulier était une tout autre affaire, surtout quand une mère-lynx avait derrière elle une jeune famille affamée à défendre et à nourrir. Un-Œil venait de l’apprendre à ses dépens.

Mais le Wild a ses lois et l’heure devait arriver où, pour le salut de son louveteau gris, la louve, poussée elle aussi par l’implacable instinct de la maternité, affronterait la tanière dans les rochers et la colère de la mère-lynx.