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projeté, d’une seule poussée, à travers la porte de l’enclos. Une troisième fois, il eut à combattre contre deux chiens, simultanément. Ce fut sa plus rude bataille. Mais il finit par les tuer tous deux et faillit lui-même en crever.

Lorsque commencèrent à tomber les premières neiges de l’automne et que le fleuve se mit à charrier, Beauté prit passage, avec Croc-Blanc, sur un steamboat qui remontait, vers Dawson, le cours du Yukon. Grande était, par toute la contrée, la réputation de Croc-Blanc. On le connaissait sous le nom du « loup combattant », dans les moindres recoins du pays, et la cage dans laquelle il était enfermé, sur le pont du bateau, était environnée de curieux.

Il rageait et grondait vers eux, ou bien se couchait, d’un air tranquille, en observant tous ces gens, dans les profondeurs de sa haine. Comment ne les eût-il pas haïs ? Haïr était sa passion et il s’y noyait. La vie, pour lui, était l’Enfer. Fait pour la liberté sauvage, il devait subir d’être captif et reclus. Les gens le regardaient, agitaient des bâtons entre les barreaux de sa cage, pour le faire gronder, puis riaient de lui.

Quand le steamboat fut arrivé à Dawson, Croc-Blanc vint à terre. Mais toujours dans sa cage et livré aux regards du public. On payait cinquante cents[1], en poussière d’or, le droit de le voir. Afin que les assistants en eussent pour leur argent et que l’exhibition gagnât en intérêt, aucun repos

  1. Cent, monnaie américaine valant au pair 0 fr. 05 centimes. (Note des Traducteurs.)