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Mais comme s’il avait voulu dans ce court laps de temps reprendre de nouvelles forces, l’ouragan, en apparence assoupi, se réveilla tout à coup.

Ce fut alors la fin de tout.

Les vagues se remirent à bondir vers le ciel, des vagues ivres, des vagues démentes, qui fusaient vers les nuages, en jets rigides, pareilles à des bouchons projetés par des bouteilles de champagne.

Elles dépassaient le faîte des mâts. Elles atteignaient, croiriez-vous ? la hauteur d’une maison de sept étages.

Puis, se heurtant les unes contre les autres, elles retombaient du ciel en cataractes, avec des éclaboussures monstrueuses.

Nous étions en plein centre du cyclone. C’était un enfer d’eau, l’anarchie de l’océan.

Et la Petite-Jeanne, me demandez-vous ? Que devint la Petite-Jeanne ? Je n’en sais rien. Elle fut annihilée, mise en miettes, pulvérisée.

Je me retrouvai dans la mer, aux trois quarts noyé, nageant comme un automate.

Comment avais-je, du pont de la goélette, passé dans la mer ? Je ne pourrais le dire et n’en ai gardé aucune idée.

Je me rappelle seulement avoir vu la Petite-Jeanne se désagréger de la proue à la poupe, et qu’à ce moment même, je perdis la notion des choses. Mon cerveau fut, hors de ma tête, enlevé comme par une gifle.