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une loque de toile ne subsistait sur les mâts. Les vergues mêmes avaient été arrachées.

Par un phénomène étrange, sous le poids de ce vent qui pesait sur elle et la comprimait, en quelque sorte, la mer sembla soudain se calmer.

On eût dit encore, si vous préférez cette définition, que le cyclone avait sucé les vagues.

Le capitaine Oudouse profita de ce court répit pour lancer à la mer une ancre flottante.

C’était un bizarre instrument, dont je n’avais vu encore aucun spécimen, un grand cône de toile, dont la partie supérieure était cerclée de fer, de façon à la maintenir ouverte. Une sorte de cerf-volant aquatique, qui, dans l’eau, se maintenait perpendiculaire et sans couler.

Une longue corde la rattachait à la proue de la goélette et procurait à celle-ci une stabilité relative.

Ce fut ensuite le vent qui brusquement tomba. Il nous avait imposé, quatre heures durant, une telle tension nerveuse que cette accalmie complète, sans transition aucune, loin de nous soulager, ne fit qu’accroître notre malaise.

L’effroyable pression que nous subissions se à trouvant subitement supprimée, il nous semblait que nos corps allaient éclater et, dans toutes les directions, voler en morceaux à travers l’espace.

Quoique la goélette, entièrement désemparée, ne fut plus qu’une masse inerte, nous reprîmes courage, cependant, et nous nous berçâmes de la brève illusion que nous étions sauvés.