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bittes de tribord. Sa tête éclata comme un œuf[1].

Personnellement, je m’étais élancé à temps sur le toit du rouf central et m’étais accroché, comme une araignée, aux manœuvres du grand mât.

Ah Choun et l’un des Américains voulurent m’imiter, Mais il était trop tard. Comme un simple fétu de paille, l’Américain fut cueilli par la vague et, de la proue, expédié au gouffre.

Plus heureux, Ah Choun put au passage saisir une des poignées de la roue du gouvernail et, pendant quelques instants, se maintenir, en titubant, à côté du timonier.

Mais une grosse Canaque, qui pesait bien dans les deux cent cinquante livres, s’accrocha à son tour au Chinois, en lui passant ses bras autour du cou. Ah Choun se rejeta sur le timonier, un Canaque également, d’une robustesse exceptionnelle, et qui tit bon, tout d’abord.

Mais une brusque oscillation de la goélette lui fit perdre l’équilibre et toute la grappe culbuta dans la mer.

La troisième lame, la plus forte, fut la moins meurtrière. Quand elle déferla, tous les êtres valides que portait encore la goélette s’étaient hissés dans le gréement.

Il ne restait plus sur le pont qu’une douzaine à peine de misérables, à demi noyés ou assommés, qui roulaient ou rampaient, en cherchant en vain un abri.

  1. Les bittes sont des billots de bois ou de fonte, qui se trouvent sur le pont des navires et servent à amarrer les cordages.