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Il était pris. Il avait accepté la dent.

« Un missionnaire, ô Bouli, suggéra Erirola, est une bien petite chose et l’importance en est mince.

— Évidemment, répondit le Bouli, qui reprenait ses esprits. Une petite chose… Un rien, Mongondro aura les bottes !

« Que trois des jeunes hommes ici présents s’en aillent sur le sentier au-devant du missionnaire, et qu’ils l’amènent.

« Qu’ils l’amènent, sans oublier les bottes…

— C’est inutile, s’exclama Erirola. Le voici justement qui arrive. »

John Starhurst, toujours flanqué de Naraou, émergeait en effet de la brousse et s’avançait fièrement sur l’étroite esplanade où trônait le Bouli de Gatoka.

Il le regarda fixement, et promena ses yeux autour de lui.

Ses douces prunelles grises flamboyaient. Inaccessible au doute et à la crainte, confiant dans Dieu qui l’envoyait, il exultait de bonheur.

Car il n’ignorait pas que, depuis l’origine des temps, il était le premier homme blanc qui, dans la montagne de Viti-Levou, foulait le sol de la forteresse de Gatoka.

Elle était située dans une gorge escarpée, encaissée entre deux précipices, où, de droite et de gauche, pareilles à des ruches d’abeilles, les paillotes du village s’accrochaient aux rochers, en surplombant le cours torrentueux de la Rewa.

Trois heures de soleil, au maximum, pénétraient journellement dans ce sinistre et noir