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Naouri employa ce temps à rattacher le balancier au tronc d’arbre creux qui constituait la pirogue. Elle utilisa pour ce travail toutes les fibres de coco qu’elle avait à sa disposition et ce qui lui restait de sa robe.

Le tronc d’arbre était quelque peu fendu, et Naouri ne voyait aucune possibilité de le rendre étanche. Alors, d’une noix de coco, elle fit une écope pour évacuer l’eau.

Il fallait aussi une pagaie. Au prix de peines infinies, Naouri en fabriqua une avec des planches de la caisse qui avait contenu les boîtes de saumon et qu’elle lia à une branche d’arbre, recueillie sur le rivage.

Il fallait que la ligature fût solide. Aussi Naouri se coupa-t-elle les cheveux au ras du crâne, en se servant d’un morceau de fer-blanc d’une des boîtes comme d’un couteau. Et, de ses cheveux, elle tressa ensuite une bonne corde.

Le dix-huitième jour, sur le coup de minuit, par un beau clair de lune, Naouri poussa la pirogue à la mer et repartit pour Hikouérou.

Naouri était vieille. Les souffrances endurées et l’insuffisance de nourriture l’avaient amaigrie au point que rien ne restait d’elle, sinon les os, les muscles et la peau.

La pirogue était de grandes dimensions et faite pour être pagayée par trois hommes robustes. Naouri, cependant, la conduisit seule, s’arrêtant de temps à autre pour écoper.

À la pointe du jour, Takota était déjà loin, mais Hikouérou ne paraissait pas.