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« Beaucoup d’hommes blancs furent tués. Tout en combattant, ceux qui restaient mirent un canot à la mer. Parmi eux étaient le patron du bateau et la femme blanche, qui lui appartenait.

« Il la fit glisser dans le canot, avec une corde, et tous ramèrent pour se sauver.

« Mon père, qui vivait encore en ce temps-là, était un homme fort. Il lança un javelot, qui entra dans le flanc de la femme blanche et ressortit de l’autre côté du corps. La femme blanche en mourut.

« Ah ! non, je n’avais pas peur. Personne, parmi nous, n’avait peur ! »

À ce glorieux souvenir, l’orgueil du noir s’était réveillé. Il enleva soudain le lava-lava qui lui ceignait les reins et me montra, dans sa chair, la marque indubitable d’une balle.

Juste à ce moment, sa ligne se mit à filer. Il se tut et commença à la tirer.

Mais il se trouva que le poisson, en se débattant, l’avait enroulée autour d’une branche de corail.

Estimant qu’en l’ayant fait indûment parler j’avais détourné son attention de la pêche et provoqué l’incident, Oti me jeta un regard de reproche.

Puis il passa par-dessus bord et piqua une tête dans le lagon dans la direction de sa ligne, qui suivit.

Il y avait dix brasses de fond. Je me penchai sous la nuit étoilée et observai, dans l’eau où ils descendaient, les pieds du bonhomme qui remuaient en cours de route de pâles phosphorescences, pareilles à celles des feux-follets.

Un plongeon de dix brasses, c’est-à-dire de