Page:London - Constuire un feu, nouvelles, trad Postif et Gruyer, 1977.djvu/57

Cette page a été validée par deux contributeurs.

rapidement, son haleine saupoudrait de givre ses moustaches, ses sourcils et ses cils.

Sur la fourche gauche de l’Henderson Creek, les sources semblaient moins nombreuses et, pendant une demi-heure, l’homme n’en aperçut aucun indice.

Puis l’événement arriva. À un certain endroit qui ne décelait aucun signe suspect, où la neige, régulière et lisse, paraissait indiquer en dessous un terrain solide, l’homme enfonça. Le trou n’était pas profond et il s’en tira en se mouillant seulement jusqu’à la moitié des mollets.

Il n’en fut pas moins furieux et, quand il se retrouva sur le sol ferme, il se mit à pester contre son mauvais sort. Il avait espéré atteindre le campement et rejoindre ses camarades à six heures. Cet accident le retarderait d’une heure. Car il lui fallait reconstruire un nouveau feu, pour y sécher ses chaussures. C’était là une nécessité impérieuse, par cette basse température, il ne le savait que trop.

Il se dirigea donc vers la berge du cours d’eau, qu’il gravit. Le bois, par bonheur, était abondant. Là encore, les grandes eaux du printemps avaient, sous les sapins, amassé un dépôt de bois mort. Il y avait de fines herbes sèches et de menues brindilles, et aussi des tas de branches et de bûches de toutes dimensions. Il commença donc par étaler et ranger sur la neige un certain nombre de grosses bûches, pour servir de foyer à son feu et empêcher la jeune flamme de se noyer dans la neige fondue. Puis il opéra comme précédemment, en grattant une allumette sur un petit morceau d’écorce de bouleau, et en alimentant la flamme, tout d’abord avec des touffes d’herbes desséchées et des brindilles.

Accroupi sur la neige, l’homme procédait méthodiquement et sans hâte, avec la pleine conscience du danger qu’il courait. Graduellement, à mesure qu’elle grandissait, il jetait à la flamme des bouts de bois de