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mille dollars, qui doivent être payés, en or, à ma cliente.

Porportuk acquiesça et dénoua le sac. El-Sou, debout au bord du fleuve, déchira les papiers en menus morceaux, et envoya voltiger ceux-ci sur le Yukon. Puis la pesée d’or commença.

— Il est bien entendu, dit Porportuk à Tommy qui ajustait les balances, que l’once est comptée à dix-sept dollars…

— Non, à seize ! interrompit El-Sou, d’une voix tranchante.

— Il est d’un usage courant dans le pays, protesta Porportuk, de calculer l’once d’or à dix-sept dollars. Il en est ainsi pour toutes les transactions commerciales, et ceci en est une.

El-Sou se mit à rire.

— Cet usage, dit-elle, est tout nouveau. Il date seulement de ce printemps. L’an dernier, et les années précédentes, l’once était comptée à seize dollars. Elle était à ce taux, quand mon père a contracté ses dettes. Lorsqu’il dépensait au Poste l’argent qu’il recevait de toi, on lui donnait, pour une once d’or la valeur de seize dollars, et non de dix-sept !

Porportuk ronchonna, sans plus faire d’opposition, et la pesée continua.

— Fais trois tas, Tommy ! dit El-Sou. Un, ici, de mille dollars. Là, un autre, de trois mille. Et là, un troisième, de six mille.

Cette opération fut assez longue et, tant qu’elle dura, tout le monde épiait Akoun.

— Il attend, avança quelqu’un, que le prix soit achevé d’être payé.

La phrase courut de bouche en bouche, et chacun guetta l’instant où le dénouement escompté se produirait. L’homme de Porportuk qui tenait le fusil n’observait pas le jeune Indien avec moins d’attention.