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à naître dans des milliers de siècles, je n’aurais jamais vu le jour.

Néanmoins, Oreille-Pendante et moi désirions ardemment retourner auprès des nôtres. Durant nos pérégrinations, nous avions souffert de nostalgie ; souvent j’évoquais le souvenir de la Rapide, cette jeune fille à la voix douce, dont la compagnie me plaisait et qui vivait seule, nul ne savait où. Son image réveillait en moi une sorte d’appétit, que je ressentais même lorsque ma faim était apaisée, après un copieux repas.

Revenons à notre fleuve. La nourriture abondait sur la rive ; on y trouvait surtout des baies et des racines succulentes ; aussi nous nous y attardâmes plusieurs jours. Alors une idée traversa l’esprit d’Oreille-Pendante et il me fut donné d’en suivre point par point le processus mental. Je la vis venir : les yeux de mon compagnon prirent une expression plaintive et chagrine, et il sembla tout bouleversé. Son regard se troubla comme si cet embryon d’idée voulait lui échapper, puis sa physionomie redevint soucieuse et de nouveau il saisit l’idée.