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ont imprimé un effroi salutaire, sans blesser par les cruautés et les dilapidations d’une autre époque. À côté des anciens missionnaires, marchaient des oiseaux pillards, prêts à dévorer la semence qu’ils répandaient à la sueur de leur front. Le blasphème étouffait la piété naissante, et la charité, prêchée par eux, expirait, sous la compression d’une avarice ambitieuse. Il n’en est plus aujourd’hui de même. Le commerce européen n’est point un oiseau de proie qui fond sur la propriété d’autrui et l’enlève contre toute justice, malgré les oppositions les plus naturelles. La terreur ne précède pas nos vaisseaux dans leur vol rapide, et quand on ne craint plus, on est bien près d’aimer. Tel a été le résultat des voyages fréquents faits depuis quelques années, voyages que le perfectionnement de la marine et la connaissance certaine des routes océaniques ont rendus moins longs et moins périlleux.

Et ce n’est pas tout encore : une entreprise gigantesque vient de naître sous le patronage de M. Ferdinand de Lesseps, également féconde pour le christianisme, la civilisation et le commerce ; je veux parler de l’isthme de Suez.

Ainsi que vous le savez, la grande péninsule africaine est séparée de l’Asie par une langue de terre fort étroite dont la longueur égale environ trente lieues ; située entre la Méditerranée et le golfe Arabique, elle a jusqu’à ce jour forcé les vaisseaux qui se rendent aux Indes à contourner l’Afrique, et, par la difficulté de l’entreprise, arrêté d’une façon déplorable la propagation de la foi et des mœurs européennes. Péluse et Suez sont situés à ses deux extrémités. La nature même des lieux semble prouver qu’elle fut providentiellement destinée à unir les deux mers, puisqu’elle