Page:Lodoïx - Les saints martyrs japonais, 1863.pdf/64

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nous parlons ; l’accusé sait d’avance sa condamnation et attend la peine s’il ne la prévient.

Eh bien ! cette terreur affreuse, qui tient sans cesse suspendue sur la tête d’un citoyen l’épée allégorique de Damoclès, devait ralentir et amoindrissait les progrès de la foi. Sans doute il y avait d’éclatants témoignages au nom de Jésus, on sacrifiait presque toujours le temps qui passe à l’éternité ; mais que d’abstentions, que d’âmes émues par la grâce et retenues par la peur.

Entre les moyens coërcitifs employés fréquemment en Chine et dans les îles japonaises, nous devons compter l’exil des missionnaires, leur supplice quelquefois. La distance qui sépare nos pays de l’Orient laissait dans une indifférence absolue, une complète ignorance, les peuples entre eux. L’empereur du Japon voyait descendre dans ses ports des hommes dont l’extérieur était loin d’annoncer l’importance. Tantôt c’étaient des commerçants inoffensifs, faisant leur trafic sans bruit, reprenant la mer après leurs échanges, tantôt des prêtres dont il ne devinait pas bien le but, jusqu’à ce que les serviteurs de Boudah l’eussent jeté dans une fausse alarme. Les punir en autocrate, les mettre en croix ou jeter dans la fosse n’avait pour lui rien de bien dangereux ; quel est le souverain d’Europe qui eut osé franchir l’immensité des mers pour s’attaquer, chez lui, à un homme puissant, maître de ressources relativement immenses et sous sa main ? Aussi les victimes étaient-elles immolées sans que l’Occident l’apprît ou s’en occupât autrement.

Telle était en résumé la position des anciens missionnaires à Jeddo, à Pékin et aux Indes, ce qui doit redoubler notre admiration. Elle était pire encore. La