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c’est lui qui confère tous les titres et dignités, directement ou indirectement. Il est vrai qu’après les guerres civiles qui ensanglantèrent la succession de Taïco-Sama, et qui furent si fatales aux chrétiens, amis et ennemis, las de verser du sang, se jetèrent dans les bras de Yeyace, aujourd’hui devenu le dieu Gonguen-sama. L’horreur qu’on avait des guerres intestines servit à affermir le pouvoir des Taïkongs, qui dès lors purent se croire héréditaires. Mais les peuples oublient vite les services rendus. Les chogoons, enflés de leurs succès, commencèrent cette petite guerre de tracasserie contre le chef de l’empire et ce système de tyrannie contre les daïmios, qui finit par révolter l’opinion. Le jeune Taïkong est un homme d’une capacité peu commune. Sauvera-t-il sa dynastie du naufrage ? Nous n’oserions pas dire que nous l’espérons et que nous le désirons ; seulement, c’est un phénomène historique qu’un gouvernement ne s’appuyant que sur des moyens aussi violents, c’est à-dire sur les meurtres secrets au moyen de la délation la plus honteuse, et qui cependant a pu durer plus de deux cents ans.

En lisant et relisant tout ce qui a été écrit sur ce peuple par les auteurs hollandais ou leurs commentateurs, on serait tenté de croire qu’il n’y a pas de peuple plus heureux sur la terre, et qu’on retrouve sous ce gouvernement patriarcal la simplicité et le contentement de l’âge d’or. Mais nous savons aujourd’hui à quoi se réduit cette prospérité. Malgré la richesse du sol, la statistique nous donne chaque année un affreux chiffre de ceux qui sont morts de faim, de froid, ou d’infirmités que leur pauvreté ne leur permettait pas de soigner.

Qui n’a pas lu ou entendu dire que c’était un peuple