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AVANT-PROPOS.

rens ſujets qui ſe préſentent à notre Eſprit, je ne m’engagerai point à conſiderer en Physicien, la nature de l’Ame ; à voir ce qui en conſtitue l’eſſence, quels mouvemens doivent s’exciter dans nos Eſprits animaux, ou quels changemens doivent arriver dans notre Corps, pour produire, à la faveur de nos Organes, certaines ſenſations ou certaines idées dans notre Entendement ; & ſi quelques-unes de ces idées, ou toutes enſemble dépendent, dans leur principe, de la Matiére, ou non. Quelque curieuſes & inſtructives que ſoient ces ſpéculations, je les éviterai, comme n’ayant aucun rapport au but que je me propoſe dans cet Ouvrage. Il ſuffira pour le deſſein que j’ai préſentement en vûë, d’examiner les différentes Facultez de connoître qui ſe rencontrent dans l’Homme, entant qu’elles s’exercent ſur les divers Objets qui ſe préſentent à ſon Eſprit : & je croi que je n’aurai pas tout-à-fait perdu mon temps à méditer ſur cette matiére, ſi en examinant pié-à-pié, d’une maniére claire, & hiſtorique, toutes ces Facultez de notre Eſprit, je puis faire voir en quelque ſorte, par quels moyens notre Entendement vient à ſe former les idées qu’il a des choſes, & que je puiſſe marquer les bornes de la certitude de nos Connoiſſances, & les fondemens des Opinions qu’on voit regner parmi les Hommes : Opinions ſi différentes, ſi oppoſées, ſi directement contradictoires, & qu’on ſoûtient pourtant dans tel ou tel endroit du Monde, avec tant de confiance, que qui prendra la peine de conſiderer les divers ſentimens du Genre Humain, d’examiner l’oppoſition qu’il y a entre tous ces ſentiments, & d’obſerver en même temps, avec combien peu de fondement on les embraſſe, avec quel zèle & avec quelle chaleur on les défend, aura peut-être ſujet de ſoupçonner l’une de ces deux choſes, ou qu’il n’y a abſolument rien de vrai, ou que les Hommes n’ont aucun moyen ſûr pour arriver à la connoiſſance certaine de la Vérité.

§. 3.Méthode qu’on y obſerve. C’eſt donc une choſe bien digne de nos ſoins, de chercher les bornes qui ſéparent l’Opinion d’avec la Connoiſſance, & d’examiner quelles règles il faut obſerver pour déterminer exactement les dégrez de notre perſuaſion à l’égard des choſes dont nous n’avons pas une connoiſſance certaine. Pour cet effet, voici la Méthode que j’ai réſolu de ſuivre dans cet Ouvrage.

I. J’examinerai prémiérement, quelle eſt l’origine des Idées, Notions, ou comme il vous plaira de les appeler, que l’Homme apperçoit dans ſon Ame, & que ſon propre ſentiment l’y fait découvrir ; & par quels moyens l’Entendement vient à recevoir toutes ces idées.

II. En ſecond lieu, je tâcherai de montrer quelle eſt la connoiſſance que l’Entendement acquiert par le moyen de ces Idées ; & quelle eſt la Certitude, l’Evidence, & l’Etenduë de cette connoiſſance.

III. Je rechercherai en troiſiéme lieu, la nature & les fondemens de ce qu’on nomme Foi, ou Opinion ; par où j’entens Cet Aſſentiment que nous donnons à une Propoſition entant que véritable, mais de la vérité de laquelle nous n’avons pas une connoiſſance certaine. Et de là je prendrai occaſion d’examiner les raiſons & les dégrez de l’aſſentiment qu’on donne à différentes Propoſitions.

§. 4.Combien il eſt utile de connoître l’étenduë de notre Compréhenſion. Si en examinant la nature de l’Entendement ſelon cette Méthode, -