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Du Gouvernement Civil,

vail, qui est mien, mettant ces choses hors de l’état commun où elles étoient, les a fixées et me les a appropriées.

V. S’il étoit nécessaire d’avoir un consentement exprès de tous les membres d’une société, afin de pouvoir s’approprier quelque partie de ce qui est donné ou laissé en commun ; des enfans ou des valets ne sauroient couper rien, pour manger, de ce que leur père ou leur maître, leur auroit fait servir en commun, sans marquer à aucun sa part particulière et précise. L’eau qui coule d’une fontaine publique, appartient à chacun ; mais si une personne en a rempli sa cruche, qui doute que l’eau qui y est contenue, n’appartienne à cette personne seule ? Sa peine a tiré cette eau, pour ainsi dire, des mains de la nature, entre lesquelles elle étoit commune et appartenoit également à tous ses enfans, et l’a appropriée à la personne qui l’a puisée.

VI. Ainsi, cette loi de la raison, fait que le cerf qu’un Indien a tué, est réputé le bien propre de cet homme, qui a employé son travail et son adresse, pour acquérir une chose sur laquelle chacun avoit auparavant un droit commun. Et parmi les peuples civilisés, qui ont fait tant de loix