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Du Gouvernement Civil,

ne peut avoir aucune prétention. Le travail de son corps et l’ouvrage de ses mains, nous le pouvons dire, sont son bien propre. Tout ce qu’il a tiré de l’état de nature, par sa peine et son industrie, appartient à lui seul : car cette peine et cette industrie étant sa peine et son industrie propre et seule, personne ne sauroit avoir droit sur ce qui a été acquis par cette peine et cette industrie, sur-tout, s’il reste aux autres assez de semblables et d’aussi bonnes choses communes.

IV. Un homme qui se nourrit de gland qu’il amasse sous un chêne, ou de pommes qu’il cueille sur des arbres, dans un bois, se les approprie certainement par-là. On ne sauroit contester que ce dont il se nourrit, en cette occasion, ne lui appartienne légitimement. Je demande donc : Quand est-ce que ces choses qu’il mange, commencent à lui appartenir en propre ? Lorsqu’il les digère, ou lorsqu’il les mange, ou lorsqu’il les cuit, ou lorsqu’il les porte chez lui, ou lorsqu’il les cueille ? Il est visible qu’il n’y a rien qui puisse les rendre siennes, que le soin et la peine qu’il prend de les cueillir et de les amasser. Son travail distingue et sépare alors ces fruits des autres biens qui sont communs ; il y ajoute quelque chose