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Du Gouvernement Civil,

lorsque tous ne peuvent pas être conservés, la sûreté de l’innocent doit être préférée, et un homme peut en détruire un autre qui lui fait la guerre, ou qui lui donne à connoître son inimitié et la résolution qu’il a prise de le perdre[1] : tout de même que je

  1. Les Jurisconsultes Romains approuvent cette conduite, Jure hoc evenit, disent-ils, Digist. Lib. I, T. I de Just. et Jure. Leg. III, ut quod quisque ob tutellam corporis sui fecerit : jure fecisse existimetur. Et Hérodien dit expressément : « Il est également juste et nécessaire de repousser par la force les insultes d’un agresseur plutôt que de les souffrir patiemment, puisque autrement avec le malheur d’être tué, on a encore la honte de passer pour un homme sans cœur ». Liv. IV, c. 10. Pufendorff est du même sentiment, dans le Chap. 5. du Liv. II, où il traite de la juste défense de soi-même ; cependant, il veut que, avant d’en venir à l’extrémité avec un agresseur injuste, on met en œuvre toutes les voies qui peuvent conduire à un accommodement : « Mais, dit-il, lorsque ces voies de douceur ne suffisent pas pour nous sauver ou pour nous mettre en sûreté, il faut en venir aux mains. En ce cas, si l’agresseur continue malicieusement à nous insulter sans être touché d’aucun repentir de ses mauvais desseins, ou peut le repousser de toutes ses forces en le tuant même… si dans l’état de nature, dit-il plus bas, on donnoit quelques bornes à cette liberté, c’est alors que la vie deviendroit véritablement insociable ». L. c.